COMMUNIQUE : la protection des générations futures enfin reconnue. Pour autant, Cigéo n'est pas validé !

Ci-dessous, le communiqué des organisations à l'initiative de la Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) déposée dans le cadre du recours contre l'utilité publique du projet Cigéo à Bure et à propos de laquelle le Conseil Constitutionnel vient de rendre sa décision

 

En effet, le Conseil Constitutionnel a reconnu ce vendredi 27 octobre 2023 la protection des générations futures. Nous nous félicitons que cette démarche ait permis de faire évoluer la prise en compte juridique des générations futures. Évidemment, il ne s'agit pour nous que d'une semi-victoire : nous regrettons que cette protection ne remette pas en question Cigéo dans le texte. Mais attention, cette décision du Conseil ne valide en rien le projet. Quelques précisions pour éviter des raccourcis :

1) Le projet Cigéo a une envergure telle qu'il pose des questions absolument nouvelles : jamais les générations futures n'ont été autant impliquées par un projet industriel. Il faut dire qu'il est tentaculaire et que l'utilisation de l'énergie nucléaire génère des déchets qui seront encore actifs dans 100 000 ans. Vertige !

2) Le Conseil Constitutionnel ne s'est pas prononcé sur la légalité du projet Cigéo. Sa décision se limite à la façon dont le projet prend en compte les générations futures dans le texte. Il a ainsi estimé que la définition de la réversibilité était considérée comme suffisante dans sa rédaction actuelle pour protéger les générations futures.

3) Bien sûr, nous aurions souhaité que le Conseil aille plus loin mais il ne faut pas lire entre les lignes ce que le Conseil ne dit pas : sa décision n'est en rien une validation législative du projet. Il ne se prononce pas là-dessus et notre recours au Conseil d’État contre l'utilité publique de Cigéo se poursuit.

4) Cela ne signifie en aucun cas que la réversibilité (et en particulier la récupérabilité des déchets) serait réalisable. A ce jour, nous défendons que la réversibilité reste un élément de langage pour faire passer le projet. Sa faisabilité technique n'est pas démontrée. Son coût, pas estimé.

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COMMUNIQUÉ DES ORGANISATIONS REQUÉRANTES : 
La protection des générations futures  est enfin reconnue. 
Pour autant, le projet Cigéo n'est pas validé !

Saisi d'une Question Prioritaire de Constitutionnalité (QPC) au sujet de la loi encadrant l'enfouissement de déchets radioactifs (projet Cigéo), le Conseil constitutionnel a reconnu ce 27 octobre 2023 l’existence d'une protection pour les générations futures. C'est une décision historique qui ne valide en rien le projet Cigéo !


    Une décision historique : enfin une reconnaissance de la protection des générations futures

En France, la Charte de l'environnement affirme, au septième alinéa dans son préambule, « qu'afin d'assurer un développement durable, les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne doivent pas compromettre la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins ». Pour le Conseil constitutionnel, « Il découle de l’article 1er de la Charte de l’environnement éclairé par le septième alinéa de son préambule que, lorsqu’il adopte des mesures susceptibles de porter une atteinte grave et durable à un environnement équilibré et respectueux de la santé, le législateur doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures et des autres peuples à satisfaire leurs propres besoins, en préservant leur liberté de choix à cet égard ». C'est en des termes inédits que le Conseil constitutionnel a donc reconnu la protection des générations futures et des autres peuples - ce qui sous-tend l'idée de fraternité également invoquée au soutien de la QPC. En application de ce principe, le législateur devra à la fois garantir cette protection et en assurer l'effectivité. Cela représente une avancée historique !

C'est à partir des questionnements autour du projet Cigéo que le Conseil constitutionnel a été amené à prendre cette décision : d'une superficie de 270 ha en surface entre la Meuse et la Haute-Marne, et de 300 km de galeries et d'alvéoles à 500m de profondeur, il est censé accueillir des déchets radioactifs qui resteront dangereux plusieurs centaines de milliers d’années. La loi <https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032933871>[1] ne garantit pas la réversibilité de ce stockage et la récupérabilité des déchets au delà de cent ans, ce qui pose question sur les capacités décisionnelles des générations futures.

C'est ainsi, dans le cadre du recours contre la déclaration d’utilité publique de Cigéo devant le Conseil d’État, que ce dernier a soumis au Conseil constitutionnel, à la demande des associations requérantes, une « Question Prioritaire de Constitutionnalité <https://www.conseil-constitutionnel.fr/sites/default/files/2023-08/20231066qpc_saisinece.pdf> » (QPC)[2]. Concrètement, il était demandé si ces modalités de stockage peuvent constituer une atteinte à la protection des générations futures.

Si le Conseil constitutionnel reconnaît l’existence d'une protection des générations futures, il estime que les modalités du stockage géologique profond, prévues par la loi, sont conformes à la Constitution. Nous ne comprenons pas cette partie de la décision, car, en réalité, la réversibilité et la récupérabilité ne sont pas assurées ni pendant la phase d'exploitation, ni après la fermeture du site.

    Pour autant, le projet Cigéo n'est pas validé !

En effet, le Conseil constitutionnel a admis qu' "en permettant le stockage de déchets radioactifs dans une installation souterraine, [la loi est], au regard de la dangerosité et de la durée de vie de ces déchets, susceptible de porter une atteinte grave et durable à l’environnement".

Nous restons optimistes car cette décision ne signifie absolument pas que le projet Cigéo, dans sa globalité, est autorisé : seules les dispositions législatives prévoyant la réversibilité du projet ont été jugées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel;

Nos organisations et les riverain⋅es requérant⋅es continuent de dénoncer les impacts de ce projet titanesque et extrêmement dangereux.

La prochaine étape est de poursuivre le recours devant le Conseil d’État pour faire reconnaître l'illégalité de la déclaration d'utilité publique du projet et de sa reconnaissance comme opération d'intérêt national.


Les organisations requérantes :

Arrêt Nu Nucléaire Drôme-Ardèche
Arrêt Du Nucléaire 34
ASODEDRA
Attac France
Attac Vosges
Bure Zone Libre
CACENDR
CEDRA
Champagne Ardennes Nature Environnement
Confédération paysanne Grand Est
Confédération paysanne Meuse
EODRA
France Nature Environnement
Global Chance
Greenpeace France
Les Habitants Vigilants du canton de Gondrecourt
Observatoire du Nucléaire
Réseau Sortir Du Nucléaire
Stop Transports - Halte au Nucléaire
Tchernoblaye
Vosges Alternatives au Nucléaire

et 12 autres organisations.


Les riverain⋅es du projet Cigéo :

Antoine Claude
Barrilliot Laurent
Biro Catherine
Labat Christian
Labat Danielle
Labat Michel
Laurent Barillot
Robert Bernard
Robert Françoise
Tincelin Adel

et 20 autres personnes.

[1] https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032933871
[2] https://www.conseil-constitutionnel.fr/sites/default/files/2023-08/20231066qpc_saisinece.pdf